10 milliards d’impôts français vont désormais financer la rentabilité d’un fonds de pension canadien
Arromanches, le 19 mai 2020
[bleu] L’éolien en mer français ultra-subventionné est désormais la Rue de la paix du Monopoly mondial ![/bleu]
Les trois premiers projets éoliens en mer français, attribués en 2012, font l’objet d’une aide d’Etat de 510,5 M EUR par an pendant 20 ans, soit plus de 10 milliards d’Euros d’impôts français à collecter pour ces 3 projets.
Cette aide d’Etat gigantesque prend la forme d’un prix de rachat garanti par l’Etat de l’électricité produite, compris entre 135 et 144 EUR/MWh, alors que les projets européens d’éoliennes en mer, dont celui de Dunkerque, se négocient depuis 2018 autour d’un prix de marché de 45 EUR/MWh, après 10 ans d’effondrement des prix.
Depuis 4 ans, la bonne affaire attire les investisseurs nord-américains. La société Eolien Maritime France, qui a gagné ces trois contrats juteux en 2012, voit désormais son actionnariat quitter l’Europe à 50% et accueillir cette semaine le fonds de pension canadien CPP Investments, qui gère la retraite de 20 millions de Canadiens.
Initialement détenue à 60% par EDF et 40% par son homologue danois, champion du monde de l’éolien en mer, la société Eolien Maritime France bénéficiait d’un prix garanti élevé de l’Etat pour permettre à EDF d’acquérir l’expertise de son voisin Dong Energy.
Mais en 2016, EDF a réduit sa propre position et Dong Energy a disparu au profit du canadien Enbridge, spécialiste du transport de pétrole par oléoduc... Puis cette semaine, alors que les projets n’ont pas démarré, Enbridge prend déjà sa plus-value en cédant la moitié de sa participation au fonds de pension CPP Investments.
Le communiqué d’Enbridge est édifiant : "On s’attend à ce que la transaction améliore les rendements des capitaux propres de la société du projet, reflétant un accent continu sur une allocation disciplinée du capital", a déclaré Enbridge.
Ainsi, en quatre années, les aides d’Etat colossales (500 M EUR par an), financées par les taxes sur l’électricité en France, ne vont plus servir à permettre un transfert de compétence vers la France d’une industrie désormais mature, mais à assurer les rendements particulièrement élevés d’investisseurs canadiens.
Nous avons en France des difficultés à régler nos propres retraites. Pourquoi financer avec nos impôts celles des Canadiens ?
Références des chiffres cités :
- Tarifs garantis d’achat de l’électricité produite par les parcs éoliens en mer de Courseulles-Arromanches, Fécamp, Saint-Nazaire (respectivement de 138,7 EUR/MWh ; 135,2 EUR/MWh ; 143,6 EUR/MWh) : Commission européenne - Rapport du 26 juillet 2019, page 6 (Aides d’État SA.45274 (2016/NN), SA.45275 (2016/NN), SA.45276 (2016/NN)). Le document se trouve ici : https://ec.europa.eu/competition/state_aid/cases1/201933/269222_2088484_174_2.pdf
- Montants annuels des aides d’Etat, et budgets globaux sur toute la durée des aides : Journal officiel de l’Union européenne du 23 août 2019 : https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?qid=1575979126390&uri=CELEX:52019XC0823(01)
- Pour Courseulles : aide d’Etat annuelle de 152,5 M EUR, et aide globale de 3,058 milliards d’Euros sur toute la durée d’exploitation (Tarif d’achat : 138,7 EUR/MWh)
- Pour Saint-Nazaire : aide d’Etat annuelle de 178 M EUR, et aide globale de 3,56 milliards d’Euros (Tarif d’achat : 143,6 EUR/MWh)
- Pour Fécamp : aide d’Etat annuelle de 180 M EUR, et aide globale de 3,6 milliards d’Euros (Tarif d’achat : 135,2 EUR/MWh)
- Transaction Enbridge / CPP Investments :